Freelance Paradoxe #2 : se méfier de tous et savoir faire confiance7 minutes de lecture

Deuxième volet de la série Freelance Paradoxe, fruit de mes échanges avec Mallock. Nous y abordons la question cruciale de la confiance.

Autre tension dans les propos de Mallock : la question de la confiance. Pas une mission ne commençait sans le bon de commande signé par le directeur général ou le directeur financier. Même quand le client suppliait, il ne cédait pas. D’abord les écus ! Votre rareté vous permet quelques saines exigences…

Face au client, il fallait parfois avoir l’air d’être plus nombreux qu’un seul ce qui amènera Jean-Denis à constituer Indépendances, un mot sous tension pour désigner le collectif de freelance fantôme qui lui permettait de donner du “nous” à ses clients qui n’aurait jamais signé avec une personne seule. La grande entreprise aime les experts et se méfie des “mutlispécialistes”, “slasheurs”, “multipotentiels” et autres “léonards”, soupçonné d’amateurisme et vaguement coupables de leur liberté.

On présente les avantages du collectif au client : “vous ne payez que ce dont vous avez besoin, pas de frais de structure, pas de dépenses somptuaires, les meilleurs experts à votre service”. Vous signez ? Une fois la mission effectuée et le client comblé, on peut lever le voile et lui avouer que sa campagne de pub a été faite de A à Z par un homme seul, en charentaises dans son appartement.

Lorsque l’idée lumineuse arrive dans votre esprit, ne la lâchez pas tout de suite à votre client, prenez le soin de préparer sa venue, resserrez les nœuds du problème que vous vous apprêtez à dénouer, préparer l’écrin qui accueillera votre joyau.

Ces honnêtes mystifications n’empêchent pas la transparence. Lorsqu’il partait à la rescousse d’une agence sous pression – c’est-à-dire sur le point de perdre un gros client ou tout proche d’en signer un – son deal était clair : “vous avez le business grâce à ma proposition, j’en prends x%, ou nous échouons et vous ne payez que ce qui est dut à mes roughmen qui ont bossé sur le dossier. Et vous les payez en direct”. Ici, pas de subterfuge, pas non plus de commissions inutiles.

Quand vous êtes serein sur la valeur que vous pouvez apporter à votre client et que vous êtes conscient de votre unicité, vous pouvez vous permettre d’être transparent avec vos interlocuteurs.

Quelle conclusion tirer de tout cela ? Faut-il faire confiance, oui ou non ? À priori, non. En 40 ans de carrière freelance, on apprend à se méfier. Question de survie. Et puis quelques tours de passe-passe pour séduire un client, ça fait partie du jeu. Eux-mêmes ne se privent pas, soyez en sûrs.

Le freelance n’aime pas particulièrement les contrats, les clauses et les contentieux, il aspire à des rapports libres et vrais, c’est bien souvent pour cela qu’il a quitté la grande entreprise. Dans ce domaine comme dans d’autres, le fait de pouvoir “essayer” de nombreux partenaires nous aide à rencontrer celui ou celle qui nous convient – et même celles et ceux qui nous conviennent puisqu’il n’est pas question ici d’exclusivité. On peut alors baisser la garde, et travailler enfin l’âme en paix et le cœur léger. De nombreux clients et partenaires de Jean-Denis sont aujourd’hui ses amis.

La confiance n’est certainement pas le point de départ, mais elle apparaît sans le dire comme une finalité. Voici ce que j’ai compris de ma conversation avec Jean-Denis.

Photo by rawpixel.com

Antoine van den Broek
Rédacteur en chef d’Amédée

Indépendant, frère-fondateur de Mutinerie, penseur, acteur et témoin des nouvelles formes de travail, passionné par le développement de communautés, j’aime faire des rencontres et raconter des histoires, deux activités auxquelles je peux me livrer par la grâce d’Amédée

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