Startuper vs Freelance – la bulle et le grain de sable6 minutes de lecture

Ils se ressemblent à s’y méprendre et sont tous les deux qualifiés d’entrepreneurs, mais ils suivent des voies différentes. Pour vous, Amédée les déshabille…

Les faux jumeaux

Le freelance est assez semblable à l’artisan, on fait appel à lui pour réaliser telle ou telle chose et il se fait payer pour cela. Il vend son temps. Son revenu est fonction de son taux horaire lui-même fonction du rapport entre l’offre et la demande de son expertise.

Le startuper, lui, n’a pas de temps à perdre, ni même à vendre, ce qu’il vend, c’est un projet, une vision, un rêve derrière lequel il devra courir aussi vite que possible. Il veut bâtir quelque chose de plus grand que lui, quelque chose qui le dépasse, un truc énorme, exponentiel qui marchera sans lui et lui rapportera de l’argent sans qu’il n’ait plus besoin de ne jamais travailler. Voilà son espérance. Mais pour réaliser son rêve de bâtir quelque chose de plus grand que lui, notre apprenti-sorcier devra accepter de n’être qu’une partie de cette grande chose, il lui faudra se diluer et parfois même s’aliéner. À chaque levée fonds il sentira un peu plus l’étreinte de ceux envers qui il s’est engagé. Le futur en hypothèque, il devra décider contre son coeur, faire des compromis et parfois même se renier.

Le temps et l’argent

L’argent qu’il “crame” vient de ses investisseurs, il est rare de voir une startup de moins de trois ans vivre de ses clients et nombreuses sont celles qui, après cinq ans, continuent de fonctionner grâce à la dernière levée de fond – en attendant la prochaine. Le Freelance, lui, vit de l’argent de ses clients. Personne n’a misé sur lui à part lui-même et il n’a de comptes à rendre à personne. Il vend du présent pas du futur. Son quotidien n’en est pas rose pour autant : il stresse, bien sûr : les échéances à tenir, les périodes de creux, les clients qui ne paient pas, cette grippe qui dure…

“Entre la bulle et le grain de sable qui peut dire qui pèse le plus lourd ?”

Mais son stress est différent de celui du startuper chez qui on peut carrément parler d’angoisse. Tiendrons-nous jusqu’à la prochaine levée de fond ? Ces années passées à développer ce beau projet, ces millions investis, ces heures de gloire au JT qui rendirent mamie si fière, cette équipe de cinquante personnes qui ne compte pas son temps… Tout s’effondrera si on ne boucle pas la levée avant cet été. Un concurrent qui lève avant vous, une loi qui change, une décision de justice, un associé qui craque et la bulle si ronde, si haute, si admirable, éclate et disparaît… Comme cette grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le boeuf.

L’un dans l’autre

Entre ces deux états, la frontière est en fait plus fine qu’il n’y paraît : un freelance qui travaille comme prestataire d’une startup se voit un jour proposer un poste de CTO et quelques actions de la jeune pousse. Deux freelances, compères de longue date qui, lassés de bosser sur les projets des autres, finissent par s’associer pour développer le leur…

À l’inverse, combien de startupers aux ambitions planétaires passent, de pivots en pivots, d’un projet de plateforme B2C globale et sans partage à un job de prestataire de service B2B. Il faut bien faire rentrer des sous alors, quand le storytelling est épuisé, quand on ne peut plus compter sur l’argent d’investisseurs dont on avait besoin pour atteindre la fameuse masse critique, on va le chercher chez des clients et on se retrouve finalement prestataire, vendeur de son expertise, de son savoir-faire et de son temps.

S’il fallait choisir…

Le terme d’entrepreneur recouvre finalement des réalités bien différentes alors, avant de vous lancer, demandez-vous qui, du startuper ou du freelance, vous voulez être pour les prochaines années. Partez à la rencontre de chacun d’entre eux, écoutez leurs joies et leurs peines, lisez entre les lignes et réfléchissez à ce que vous voulez vraiment et à ce que vous êtes prêts à endurer pour cela.

“Demandez-vous ce qui compte le plus pour vous dans la volonté d’entreprendre : la puissance ou la liberté, l’adrénaline ou l’harmonie, demain ou aujourd’hui.”

Photo de couverture : Alejandro Alvarez on Unsplash
Photo #2 : NeONBRAND on Unsplash

Antoine van den Broek
Rédacteur en chef d’Amédée

Indépendant, frère-fondateur de Mutinerie, penseur, acteur et témoin des nouvelles formes de travail, passionné par le développement de communautés, j’aime faire des rencontres et raconter des histoires, deux activités auxquelles je peux me livrer par la grâce d’Amédée

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