Les freelances font campagne6 minutes de lecture

Le monde rural est historiquement le lieu du travail indépendant. Mis à mal par l’industrialisation et les progrès du salariat, ce dernier revient en force avec l’émergence d’une classe laborieuse récente : les travailleurs numériques indépendants. Ce phénomène va-t-il conduire à la naissance d’une nouvelle ruralité ?
Une courte histoire de l’exode urbain
Si l’on reste plus proche d’un équilibre que d’une migration massive, cette inversion des courbes marque une tendance. Couplée à notre sujet de prédilection – l’avènement d’un travail indépendant à grande échelle – elle laisse imaginer une reconfiguration du travail dans laquelle le monde rural tiendrait un rôle principal.
Un phénomène complexe
Les candidats à la migration sont donc principalement ceux qui participent à ce que l’on appelle “économie de la connaissance”. Leur activité est liée à l’émergence des technologies numériques, qui ont déplacé la valeur de la production industrielle à la production d’information et de connaissance.
Mais à quoi servent les villes ?
L’idée d’un repeuplement des campagnes serait donc le fantasme bucolique d’une élite parmi les indépendants ? Le “poème chantant l’amour de la campagne et peignant sous un jour idyllique la vie agreste des bouviers et des bergers”, selon la définition littéraire du terme bucolique ?
Si la part de fantasme ne doit pas être négligée, l’exode urbain va bien au-delà de quelques happy few en mesure de travailler depuis leur ordinateur ; c’est le rôle de la ville qui est bouleversé.

Transformer la campagne, tisser de nouveaux réseaux
Mutualiser les services. Face aux faibles densités du monde rural, il est nécessaire de créer des points de rencontre et de friction, qui favorisent les échanges et permettent de conserver une richesse de service. Mutinerie Village, dont l’ambition de fédérer les indépendants du Perche autour d’un lieu hybride l’a bien compris. L’ancienne ferme reconvertie en coworking, propose également du logement, un potager et un makerspace...
Collaborer au niveau local. Sans partage des bénéfices, les nouvelles initiatives sont vouées à l’échec. Codi’n Camp, porté par Simplon – un grand réseau d’écoles numériques – s’inscrit dans cette logique et propose une formation au code de 8 mois, localisée en Lozère et prioritairement ouverte aux jeunes non diplômés ou peu diplômés, aux demandeurs d’emploi, aux allocataires du RSA. Une offre construite en collaboration avec les entreprises locales, le département et la région.
Adapter les politiques publiques. Les institutions ne sont pas en reste et s’efforcent de préparer le terrain, à la fois pour accueillir les nouveaux arrivants et permettre aux acteurs locaux de s’adapter. Ainsi, Auvergne Nouveau Monde, association créée en 2011, s’est lancée dans une grande campagne de marketing territorial pour valoriser les atouts d’une région souvent identifiée à la fameuse “diagonale du vide”.
C’est assez, dit le rustique ;
Demain vous viendrez chez moi :
Ce n’est pas que je me pique
De tous vos festins de Roi ;
Mais rien ne vient m’interrompre :
Je mange tout à loisir.
Adieu donc ; fi du plaisir
Que la crainte peut corrompre.
Rédacteur
Indépendant vendu au plus offrant. Du grand groupe industriel à la petite maison d’édition, je conseille, je communique et j’écris beaucoup. Grande tendresse pour les questions de langage et de folklore digital. Éditeur de scalde.co. Grenoblois de Paris.